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Palestine: Résistance globale, par Omar Mezri


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Le présent papier, « Résistance Globale », de notre Omar Mezri est une contribution à la Conférence internationale « Palestine From Settlement to Violation of Human Rights », organisée par une vingtaine d’organisations arabes, sud- américaines et européennes, et tenue à Beyrouth les 16 et 17 Février 2013. Des raisons personnelles avaient empêché l’auteur de faire le déplacement jusqu’à Beyrouth et nous faire profiter de son immense savoir, de la profondeur et de la cohérence de sa pensée.

L’ITRI publie le texte, avec beaucoup de retard, mais mieux vaut tard que jamais !

 

Le présent papier, « Résistance Globale », de notre Omar Mezri est une contribution à la Conférence internationale « Palestine From Settlement to Violation of Human Rights », organisée par une vingtaine d’organisations arabes, sud- américaines et européennes, et tenue à Beyrouth les 16 et 17 Février 2013. Des raisons personnelles avaient empêché l’auteur de faire le déplacement jusqu’à Beyrouth et nous faire profiter de son immense savoir, de la profondeur et de la cohérence de sa pensée. L’ITRI publie le texte, avec beaucoup de retard, mais mieux vaut tard que jamais !

Résistance globale
Par Omar Mezri
Février 2013

Tous les experts en stratégie s’accordent à dire que la guerre impériale est totale avec l’objectif ultime de la maxime des généraux romains : « Epargnez ceux qui se soumettent et dompter les superbes ». Quiconque brise le mutisme et fait appel, posture ou acte contestant la domination du colonisateur a signifié à l’oppresseur qu’il n’a pas triomphé et a rappelé aux autres leur devoir de briser le mur du silence.
Le Prophète Mohamed (saws) et ses compagnons, confrontés à l’oppression, étaient appelés à écouter les paroles et à en suivre l’excellent ainsi que de dire des paroles sensées et bien visées. Les mots sont le viseur dicible et audible de la bataille de sens… La parole dit à l’ennemi et à l’ami : « j’existe, je résiste ».

Les invariants
Les verbes « exister » et « résister » ont le même sens donné par la racine latine « sistere » signifiant (se) positionner, (se) situer, (s’) arrêter, faire face.
Exister ou « ex-sistere » consiste, par le préfixe « ex » à opérer un changement d’état en sortant de soi, en allant vers l’extérieur, en cherchant de nouvelles issues ou en faisant rupture par rapport à un fait ou à une idée qui s’impose devant soi par le verbe d’action « sistere» visant à prendre position, à se situer, à faire face ou à stopper quelque chose. Exister c’est se repositionner en permanence comme un sujet en devenir dans son être et dans son acte. Exister c’est affronter sans cesse les épreuves de vie d’une manière globale. ex(s)istere est une lutte sur soi et sur les forces extérieurs pour « sortir, se manifester, se montrer, se repositionner » et rompre ainsi avec l’état antérieur où le Moi individuel ou social était bâillonné, occulté, ou contraint à des limites par des obstacles ou par des volontés contraires. Exister est un acte de résistance contre l’immobilisme et l’inertie, exister est la manifestation visible, dicible, audible et volontaire de la globalité ontologique et sociale s’exprimant notamment dans le croire, le vouloir, le savoir, le devoir, le pouvoir, le faire…
Exister est un acte universel se manifestant dans les registres singuliers de l’activité humaine politique, économique, intellectuelle, urbaine, artistique…
Résister ou « re-sistere » consiste, par le préfixe « re » à opérer un changement d’état en répétant, en inversant l’ordre, en réagissant contre, en apportant des réponses à une situation, ou en faisant retour sur une position, par le verbe d’action « sistere » qui consiste à opérer un face-à-face, à prendre position, à rompre, à arrêter.
Résister signifie « tenir tête », « faire face », « s’opposer frontalement », « refuser de marcher dans le sens voulu par la force extérieure », « se placer différemment ». Il s’agit en réalité de continuer d’exister ou d’exister à nouveau. Il s’agit de la continuité de l’action humaine par un changement de paradigme. Ainsi résister c’est (Re) sistere en reprenant position sur l’ennemi et c’est Re-exister dans une nouvelle posture physique, intellectuelle, sociale, territoriale et économique par adaptation et par réaction aux changements imposés.
Exister et résister consistent globalement à libérer la vie, c’est-à-dire libérer les conditions et les possibilités pour que l’être puisse exprimer son identité et son appartenance, et donner libre cours à ses potentiels de vie sur l’ensemble des registres d’existence. Dans un cas comme dans l’autre il y a globalité car il s’agit d’un processus de libération de l’humain contre ce qui porte atteinte à sa sacralité de ce qui fait l’humain la vie, la justice, la liberté, la dignité, l’intelligence, la paix, la sécurité …
Tant qu’il y a des épreuves de vie il y a exigence de lutte pour l’existence et tant qu’il y a confiscation ou négation des conditions et des possibilités d’existence il y a résistance contre le négateur et le réducteur des possibilités d’existence. Aussi vrai que l’être humain et son acte sont indissociables dans leur formulation et dans leur mutuelle détermination la résistance et l’existence sont indissociables dans leur formulation et leur interaction.
Exister et résister sont la même respiration de l’universel. Séparer les deux est une ineptie. Confiner l’un ou l’autre dans un contenu singulier ou isolé est en contradiction avec le principe de globalité. La résistance est une activité humaine d’existence qui va donc normalement s’exprimer dans tous les registres de l’existence civile et militaire, politique et économique, juridique et culturelle, financière et logistique, idéologique et artistique, violente et non violente, spirituel et temporelle.
Prendre position pour la globalité de la résistance c’est refuser les démarches taxonomiques simplificatrices et réductrices de la réalité. C’est aussi refuser la confiscation de la résistance par les monopoles, les rentes, le sectarisme, l’esprit partisan et le confinement.
Sémantiquement et philosophiquement, Entre exister et résister il y a le même mouvement ontologique et social qui se réalise par un être individuel et social exprimant ses attributs d’état et qui prend position par des actes de responsabilités et de changement. La différence philosophique sensible est que dans un cas on prend position pour soi et dans l’autre cas on prend position contre autrui. Dans la réalité exister et résister se confondent, ils ne sont pas deux phénomènes successifs linéaires, mais deux états concomitants.
Entre exister et résister il n’y a pratiquement aucune différence psycho affective et actantielle sauf peut-être dans le rythme et le mode de changer de positionnement, de posture, d’actions, de dynamique, de consommation du temps et de l’énergie, d’effusion de sang, de sueur et de larmes. Le peu et le beaucoup dans le même acte sous des vocables différents sont relativisés par les changements d’état imposés par les conditions et les exigences de l’existence et de la résistance.
Dans cet ordre d’idées l’effort global est requis. Il ne s’agit pas de s’enfermer dans l’attente de la concertation ou de la coordination des appareils, mais de faciliter et de participer à la synergie des processus et des initiatives structurantes. Le renouveau de l’alternative globale altermondialiste à l’ordre impériale est à revendiquer.
Bien entendu les appels au particularisme de la cause palestinienne isole et divise. Bien entendu le mouvement de la résistance globale non violente fait diversion. Bien entendu le mouvement de la résistance totale sans leader que nous voyons se développer dans le monde arabe et tenter de s’implanter en Palestine et au Liban est un acte de subversion. La violence inutile que livre les loups solitaires ou les meutes de louveteaux est un principe et un mode opératoire systématisés dans les laboratoires qui ont récupérés la doctrine de résistance totale de l’extrême droite américaine. Division, diversion et subversion sont des armes que l’Empire pratique depuis longtemps contre le droit d’exister et le devoir de résister des peuples de la planète. Il ne s’agit pas de se disperser mais de rester vigilant.

Vérité immuable
La posture et le discours de Moïse face à l’oppression nous apporte des éclaircissements magistraux qui sont toujours d’actualité sur la signification de la résistance globale et ses implications dans le rapport de l’opprimé à l’oppresseur.
Moise ne s’inscrit pas dans un rapport de force, il se positionne par rapport à la vérité et force ses partisans et ses adversaires à se repositionner par rapport à la vérité. Il va amener tous les syllogismes fallacieux à s’effondrer les uns après les autres. Il va amener toutes les fascinations à se déconstruire. Toutes les formes de despotisme économique, intellectuel, technologique, financier, militaire, territorial et politique s’épuisent face à l’énoncé de la vérité qui va dévoiler leur contenu et leur logique. Dénoncer le colonialisme ou faire l’apologie de la résistance ne suffit pas. Il faut le saper dans ses fondements idéologiques et il faut opposer à ses instruments de domination des alternatives sociales, économiques, politiques et organisationnelles.
La vérité portée par Moïse s’énonce comme évidence absolue, immuable, indivisible, inaliénable et irréversible. Elle est intrinsèque, elle se suffit à elle-même. Elle se nourrit d’elle-même pour apporter les contradictions aux manifestations du mensonge et de l’aliénation. Cette vérité n’est pas celle des hommes qui peuvent selon leur guise rendre relative, occulte, caduque, multiple. Elle est une, inaliénable, indivisible valable en tout lieu, tout temps sans dérogation ni conditions suspensives ou limitatives. Dans la langue coranique Al Haqq c’est la vérité et c’est aussi la réalité. Elles sont plus que le devoir, l’obligation, l’imposition ou la conscience. C’est l’ordre normal des choses ainsi et pas autrement.
Le caractère intrinsèque de la vérité lui donne un caractère à la fois transcendant et immanent. Toutes les motivations, tous les principes de sens et de justesse, toutes les raisons de résister trouvent leur essence dans la vérité. La perversion du rapport à la vérité par la corruption, la tyrannie, l’injustice, l’atteinte des droits des autres, l’arrogance, la dérive démiurge ou la soumission à l’idole introduit des biais ou des aveuglements dans le regard mental ontologique ou social. Le regard ne voit plus la vérité ou la voit confuse car ses mensonges et ses justifications deviennent un écran qui s’interpose entre lui et la vérité.
L’acte de résistance déconstruit et reconstruit le système de représentation et le rapport à la vérité opérant ainsi une démarcation de plus en plus grande et de plus en plus radicale entre ceux qui se sont fermés à la vérité et ceux qui ont découvert la vérité.
L’acte de libération initié et conduit par Moïse n’a pas besoin d’un rapport de forces favorables ni de reconnaissance religieuse, morale ou politique pour devenir légitime. Il est légitime par la présence de l’oppression et par la compétence de la vérité à dévoiler les mensonges et à les acculer à rester sans justifications ni arguments. La vérité suprême est que le Dessein divin a fait de l’oppresseur une épreuve pour l’opprimé et de l’opprimé une épreuve pour l’oppresseur. Le rapport à l’oppression, le rapport à la vérité et le rapport à la réalité (existence) sont intimement liés.
La dialectique oppression résistance et mensonge vérité va montrer le paradoxe du rapport des forces. L’oppresseur focalisé sur le rapport des forces va être conduit à davantage d’aveuglement, de confusion et de contradiction face à une vérité persistante et inaltérable. L’opprimé focalisé sur la vérité non seulement ne voit pas le déficit de ses moyens comme un handicap mais mobilise les moyens les moyens les plus judicieux pour sa résistance tout en se libérant du rapport des forces comme raison ou justification dans le renoncement ou le choix de la résistance. L’opprimé résistant s’inscrit dans une sorte d’épure de la conscience et d’humilité de l’être. Le processus de libération de Moïse est un changement de paradigme. Ce changement ontologique et social va construire ses moyens de résistance et va générer le flux et le nomadisme idéologique, social, politique, économique et culturel entre vérité/résistance et aliénation/oppression.
Il est vrai que Moise n’a pas eu recours à la lutte armée, mais ses deux grands signes signifiaient d’une manière éclatante la fin des symboles de puissance de Pharaon et la fin de sa vie. Les autres signes avaient vocation de rappeler la vérité et de montrer d’une manière tangible la voie de l’immanence et de la transcendance. Pharaon savait, mais il lui manquait la vérité qui donne principe de sens. Son arrogance, ses crimes et l’illusion du rapport des forces le détournaient de la vérité.
Résister c’est exister dans un rapport sain la vérité. Dans cet esprit, la vérité, l’existence et la résistance sont un don, une bénédiction, une humilité pour défendre la sacralité de la création. Lorsque le rapport à la vérité change il y a confusion dans les esprits et corruption dans les actes. Exister devient une malédiction qui ne sera surmontée que par le refus de l’opprimé à subir l’humiliation et de l’oppresseur à humilier sinon par la confrontation entre l’opprimé et l’oppresseur sur tous les terrains et par tous les moyens.
Résister en prenant parti pour la vérité et en agissant contre les mensonges et les aliénations est la démarche du Messie qui va nous éclairer sur les choix stratégiques de la résistance.
Il est admis que la communauté des Bani-Israël du temps du Messie ressemble étrangement à notre communauté. Une communauté divisée entre des intégristes attachés à la loi mosaïque interprétée selon la coutume des anciens, des romanisants fascinés par la technique, l’armée et l’administration romaine, des hellénisants trouvant leur bonheur dans la rhétorique, l’esthétique, la philosophie grecque et la mythologie, des commerçants cupides alliés aux docteurs de la foi, aux consuls romains, des opportunistes exploitant la crédulité des gens du commun, des adeptes de la magie et de l’adoration de Satan, des seigneurs de guerre qui cherchaient un roi pour prendre le pouvoir puis mener des politiques d’agression et d’expansions territoriales.
L’acte de résistance et le mouvement de libération lorsqu’ils s’expriment sous la perspective de la globalité se focalisent sur la priorité et sur l’élément décisif qui détermine tous les autres. Le Messie connaissait parfaitement la situation de son époque. La question stratégique à laquelle répond l’impératif de résister est contre qui et pourquoi. Pour le Messie il ne s’agit pas de cibler l’empire romain et son administration coloniale qui ne sont que la répercussion de la corruption de la mentalité collective qui n’a plus compétence à voir la vérité et à se donner logique et moyens de résistance.
Il faut être Prophète ou visionnaire pour comprendre que la clé de la libération ne se trouve pas dans la lutte contre les Romains, mais dans le changement de paradigme idéologique, religieux et social. Le libérateur est davantage un réformateur qu’un guerrier. Décoloniser les esprits est plus complexe que libérer la terre. Pour le Messie la libération passe par la rupture avec ce qui a corrompu l’existence sociale en l’occurrence l’instrumentalisation de la religion à des fins mondaines et l’imposition de l’amour du gain et des plaisirs mondains par une élite divisée par des sectarismes et des idéologies inconciliables. Si Moïse était confronté à l’arrogance de Coré et au désir mimétique de quelques insensés envieux de Coré qui viennent compliquer le rapport au despotisme de Pharaon, le Messie était confronté à un système d’aliénation économique et idéologique produit par l’élite religieuse se réclamant de Moïse. Les opposants à cette élite se réclament eux aussi de Moïse sans être une alternative crédible et authentique au pouvoir en place. L’empire romain est accessoire dans cette décomposition religieuse, idéologique, politique et sociale, sociale où la loi de l’argent et de l’usure impose son dictat au peuple accablé d’injustice, d’impôts, et de dettes.
Si la lutte de Moïse s’inscrivait dans un projet de libération du joug de Pharaon, celle du Messie s’inscrivait dans un projet de libération plus complexe et plus global : libérer les Hommes de Satan, restaurer la vérité prônée par Moïse et déblayer la voie à d’autres projets de libération contre l’oppression. Le principe de globalité, de vérité et d’efficacité ont mené le Messie, seul entouré des faibles et des véridiques minoritaires, à se consacrer à saper les fondements de l’oppression tout en remédiant à ses conséquences désastreuses. Il a partagé son existence à proclamer la vérité, à confondre les menteurs, à remettre en cause les fausses légitimités religieuses et intellectuelle, et à soutenir les faibles et les opprimés.
Au-delà de la charité et des miracles au sein des pauvres et des gens en souffrance, le Messie nous donne une leçon sur la définition des priorités et nous invite à penser la résistance comme une ingénierie qui sait réaliser l’articulation de la lutte contre les causes de l’oppression et les conséquences de l’oppression.

Résolution globale, l’équation fondamentale.

La culture d’empire, celle de la négation de l’humanité, de la spoliation de la spoliation, de l’oppression des hommes et de la prédation cupide et vorace des ressources est presque parvenu à évacuer le colonialisme et la colonisation de la cause palestinienne la confinant de plus en plus ici à une question de bureau des affaires indigènes à Ramallah et à un dossier humanitaire à Gaza.
Par la grâce de Dieu, l’oppresseur ne peut exister sans nier le droit d’exister des autres ni s’empêcher de recourir à la violence et que l’opprimé ne peut s’interdire à riposter. Le choc des violences, inévitable par son déterminisme historique parvient à secouer les esprits et à reposer la question invariante sur l’effusion de sang et le désordre sur terre. Cette question a le mérite de rompre avec l’oubli et d’appeler à une nouvelle réponse plus responsable et plus conséquente sur la l’équation fondamentale : la colonisation de la Palestine, la nature de la colonisation et les voies de la libération sans faux fuyant pour qu’il y ait justice, réparation et paix durable.
Les Palestiniens ne sont pas confrontés à un indu occupant qui a occupé un bien vacant avec qui il faut partager les biens après négociation ou qu’il faut chasser en comptant sur la justice et l’équité de la communauté internationale qui a livré la Palestine proie sans défense à un prédateur sans pitié. Les experts juridiques, les institutions internationales, les médias, les finances peuvent et doivent retarder et compliquer les procédures d’expropriation, de colonisation et de judaïsation. La lutte contre l’expropriation et contre la négation du droit du retour est un acte de résistance réel et symbolique.
L’expérience montre que la déstructuration du territoire algérien par le colon français pose encore problème à la structure sociale, agraire et économique de l’Algérie indépendante. L’acte de résistance par sa globalité va réguler les efforts selon la pertinence, l’opportunité et les priorités. La lutte armée et le combat politique ne peuvent tout seuls régler tous les problèmes ni faire face plus tard aux résidus, aux nuisances et aux contentieux laissés par la colonisation. La globalité exige de résister contre l’occupation et elle exige aussi de limiter les pertes de vies humaines, de foncier, de mémoire, d’archives car il faut conserver ses chances de continuer d’exister et de repartir vers un devenir avec autonomie et possibilités. L’expérience algérienne est une école. Lorsque résister et exister signifient la même réalité alors l’acte de libérer la terre et le projet d’aménager le sol non seulement s’inspirent des mêmes mobiles, mais participent au même projet et s’inscrivent dans le même devenir. Le résistant qui lutte fusil à la main, le mohsein qui donne à manger par amour de Dieu, l’enseignant qui transmet l’histoire et les valeurs, le couple qui procrée et éduque ses enfants, l’intelligence qui compile et authentifie et protège les archives et les documents du cadastre, le paysan qui laboure, tous participent au même effort de conservation des droits d’exister.
Par le verbe exister et résister l’homme exprime sa compétence humaine distinctive d’être une force de devenir, une force en devenir qui traverse les épreuves et le temps de vivre comme un virtuel, un potentiel d’actions, une semence que l’acte de résistance transforme en état actuel qui sera la configuration de nouvelles possibilités.
Lorsque l’homme perd sa mémoire, son attention et son espérance qui lui donnent identité, appartenance et projet de devenir il perd en même temps les compétences à devenir un virtuel qui se transforme et évolue dans le temps pour se réaliser. Il perd ainsi sa vocation humaine, sa dynamique et sombre dans l’inertie, la fatalité, l’incapacité à réagir à l’agression extérieure et à la servitude envers ce qui l’assujetti et l’aliène. La résistance palestinienne est non seulement vivante, mais elle nous redonne vie et confiance.
Ce serait justice, considération pour les souffrances des Palestiniens et égard pour le gisement de potentialités de leur résistance que de rappeler la vérité historique sur l’occupation. L’occupation de la Palestine était le couronnèrent du démantèlement du monde arabe et musulman par un système mondial possédant tous les instruments idéologiques, militaires, économiques, financiers, technologiques, politiques et juridiques de sa domination sur le monde y compris sur les lieux saints de l’Islam. Le monde musulman et arabe avait perdu la compétence de se régénérer et de se développer pour continuer d’exister en potentiels de vie et pour pouvoir résister en semeurs de graines de potentialités. Sa régression le rendait dialectiquement et inéluctablement vulnérable à l’expansion des autres. Le monde occidental avait acquis la compétence d’exister avec un appétit démesuré de prédateur et de négateur d’autrui. Son expansion passe par la régression de l’autre. L’Orient et l’Occident ne produisaient plus l’homme en tant que potentiel de libération et de civilisation. Par le caractère implacable de la dialectique historique et par l’ironie de la sémantique ils vont se trouver face-à-face autour du même verbe « sistere » signifiant position et positionnement.
L’un va se désister (de-sistere) en renonçant à ses positions, en se privant de prises de positions, en se privant de ce qui consolide l’action et affermit l’état socio psychologique. Il perd sa compétence d’être un virtuel, un potentiel de vie apte à exister dans un projet de devenir et à résister faire face à une agression extérieure. Après des siècles de retranchements et d’immobilisme il finit par se livrer. L’autre, par contre autour, poussé par son potentiel de vie excessif, va rencontrer le futur vaincu sur le terrain du verbe « sistere » par sa capacité psycho affective et matérielle à insister (in-sistere) c’est à dire à aller vers l’affrontement, à marcher sur l’ennemi qui a choisi de battre retraite, à lui prendre de force ses positions et à se positionner en le dominant.
Au-delà du jeu de mots il s’agit de la tragédie de la Palestine née de la rencontre du Wahn des uns et de l’arrogance cupide des autres. Le jeu de mot intentionnel exprime le rapport entre le colonisable et le colonisateur au-delà du bien et du mal, du hallal et du haram ou de l’explication eschatologique de l’histoire.
Il serait donc dommageable pour l’acte et l’intention de résistance de poser l’équation de la Palestine en termes singuliers ou locaux sans l’inscrire dans la genèse et le devenir du monde, dans ses contradictions socio historiques. Il ne s’agit pas de dédouaner L’Empire et le sionisme de leurs crimes et de leur entrée par effraction violente dans notre histoire et pour notre malheur. Il ne s’agit pas de dire aux Palestiniens ce que les communistes français ont dit aux Algériens « attendez la révolution mondiale, en se libérant le prolétaire va vous libérer et libérer les opprimés du monde ». Il s’agit de dire et de redire que notre malheur est le produit de deux facteurs. Le premier facteur endogène est notre colonisabilité. C’est l’axe principal de notre effort en qualité de colonisable. Il s’agit de nous libérer de nous-mêmes. Le second facteur exogène est le colonialisme. C’est l’axe secondaire de notre effort en qualité de colonisé ou de citoyen du monde. Il s’agit de participer aux luttes des peuples contre l’arrogance et les monopoles des oligarchies.
Il ne faut pas se mentir, la grande révolution qui décolonise les esprits et les aligne sur un axe de résistance n’est pas celle des arrangements d’appareils et de la subordination à l’Empire et aux marchés. Il ne s’agit pas d’être pessimiste, mais de placer le curseur sur le chantier que nous ne parvenons ni à conceptualiser ni à rendre opérant : « Allah ne change pas ce qui est en l’état d’un peuple tant celui-ci ne change pas ce qui est en lui ». Le changement est global. Il est ontologique dans la mesure où il faut changer notre système de représentation du monde afin de parvenir à opter pour « ce qui donne vie ». Ce changement passe par un changement de soi : changement du croire, du vouloir, du savoir, du devoir, du pouvoir et du faire dans leur manifestation la plus sensée, la plus juste, la plus opportune, la plus pertinente, la plus cohérente et la plus efficace dans les conditions qui exigent sans confusion l’affirmation ou la négation, le choix ou le renoncement.
Le second facteur exogène, est la colonisation. Elle n’intervient et ne se maintient que parce qu’elle a trouvé un terrain favorable : notre propre régression. Il est vrai que le colonialisme est un immense sabotage de l’histoire et un ennemi déclaré de l’humanité. Ceci est un constat amer qui persiste à nos jours où nous voyons d’une manière flagrante ce même colonialisme saper toutes les possibilités de notre émancipation et rendre défavorables toutes les conditions de notre existence et de notre prospérité.
La résistance en Palestine et pour la Palestine exige de mener de front une lutte contre le système mondial qui produit la prédation, la colonisation et l’oppression, et une lutte contre la disponibilité à produire de la confusion, du sous-développement.
Sans jeu de mots, l’ironie du sort semble inspirer le colonisateur et le colonisable à persister dans la même malédiction. Il y a une volonté de part et d’autre de per-sistere. La réalité du monde ressemble au préfixe « per » signifiant l’intensification, la totalisation, la déviation et la transversalité d’une situation attaché au verbe d’action « sistere » signifiant se mettre en position, en posture, en face-à-face. Nous sommes dans une phase de redoublement de l’histoire car les contradictions du passé sont toujours présentes ave force. Les uns persistent à passer à travers le temps en perdant leurs positions et en se maintenant immobiles incapables de faire face aux changements qui s’imposent brutalement à eux par l’extérieur. Les autres persistent à conquérir de nouvelles positions spoliant les territoires et les ressources des autres. Entre les uns et les autres la résistance persiste à exister.
La résistance est fatalement condamnée à se positionner contre les uns et les autres et à s’inscrire dans une globalité signifiant la lutte totale, transversale et intense contre les syndromes et les causes de l’immobilisme des uns et de la cupidité des autres. La colonisabilité et le colonialisme sont deux formes complémentaires de sabotage de l’humanité quelle que soit la forme ethnique, territoriale, religieuse de cette humanité. La libération est un double processus qui prend naissance dans la résistance à l’autre et dans la résistance à soi. Aujourd’hui plus que jamais il faut élargir le front et les moyens de luttes sur le terrain social, économique et culturel. La domination des marchés, les anciens réflexes hérités de la mentalité de colonisé, l’inculture de l’opposition politique, les stigmates du colonialisme, la rente, la corruption, l’infantilisme politique et religieux, l’économie parasitaire, l’immobilisme et la subversion impériale se manifestent par un effritement du capital social de plus en plus global. Nous sommes à la limite des seuils de rupture où l’effondrement social sera irréversible et où le cout de la reconstruction et de la résistance sera rédhibitoire.
Dans ce panorama de pessimisme et de cynisme il y a urgence à libérer – dans le discours, les concepts et les actes – la vérité sur la dignité humaine, la dignité sociale, la dignité économique, la dignité religieuse, la dignité intellectuelle, la dignité morale, la dignité esthétique de l’emprise des marchés et des bigots.

Les réseaux
Par la complexité de sa tâche la libération efficace sera celle qui va agir en même temps sur les causes endogènes et sur les causes exogènes à tous les niveaux. Ce double processus de lutte interne et externe dans ses multiples et complexes interactions passe par la mise en réseau.
La mise en réseau des hommes, de leur relais de communication, de leurs connaissances, de leurs semences, de leurs cultures, de leurs outils, de leurs solidarités, de leurs problèmes et de leurs réponses aux défis est sans doute l’activité humaine la plus perfectionnée en termes d’organisation et d’efficacité pour exister en période de crise, pour résister face à l’envahisseur, ou pour briser la résistance d’un peuple ou d’une armée. Nous pouvons dire que vivre ou résister est la capacité d’imaginer et de tisser des réseaux, de les protéger, de les restaurer et de les développer. Le réseau est le symbole par excellence de la résistance par la capacité intrinsèque de chacun de ses nœuds à être un point de convergence, de synergie, de potentialisation, de communication, d’information et de ralliement…
Lorsque exister et résister se conjuguent naturellement, les réseaux ne posent pas de problèmes particuliers si on fait abstraction des problèmes inhérents à toute activité humaine qui n’a pas encore atteint son régime de croisière ou qui se trouve confrontée à une crise. Lorsque le colonialisme et la colonisabilité s’appellent mutuellement pour cultiver l’atomicité, la dispersion, la méfiance, la défiance, la confusion, alors la mise en réseau devient problématique.
La difficulté réelle est dans la mise en réseau des communautés humaines. Il faut fédérer une communauté autour d’un nœud pour que ce nœud passe du réel virtuel au réel actuel. Il faut amener les nœuds à entrer en communication entre eux par l’échange inter et intracommunautaires. Il faut ensuite amener chaque communauté à avoir la compétence réseautique qui consiste à entretenir le réseau, à le développer et à créer d’autres nœuds ou d’autres réseaux. Lorsqu’on pose le problème en termes de communautés la difficulté sociologique, économique et communicationnelle du réseau devient plus évidente car il faut offrir des projets, des ingénieries, des ressources, des savoir-faire en matière d’intermédiation entre les compétences et les attentes.
L’explosion technologique des moyens de communication et de vitesse de calcul, paradoxalement, facilite et complique la mise en réseau. La facilitation par la démocratisation de la technique ne doit pas cacher son caractère pernicieux : la simplification et la fétichisation de la technique au détriment de l’usage réservé aux élites. La fascination de la vulgarisation technique et technologique masque les inégalités qui se creusent en termes d’acquisition et de transfert des savoirs et des savoir-faire.
Lorsqu’on pose le problème en termes philosophiques et civilisationnels de la Post Modernité, alors l’urgence et la gravité de la résistance globale donne le vertige. Les permissivités techniques et technologiques et l’agressivité des réseaux de domination mondiale n’ont de limite que leur imagination et leur prédation. L’humain est en danger.
La colonisabilité par sa capacité à se laisser fasciner par les apparences et à s’inscrire dans la spirale de ce qu’on appelle le « désir mimétique » a rapidement tissé ses réseaux pour propager la culture du futile, du mortifère et de la rumeur.
L’idée philosophique de la Post modernité était celle de la cohabitation des communautés communicantes comme des ilotismes libertaires et protéiformes sans centre ni totalité ni identité. L’idée se voulait rupture avec la prétention technicienne prométhéenne et le système de production et de consommation de la modernité. L’idée voulait retrouver des marqueurs festifs autour du mythe d’Hermès faute de trouver des civilisateurs et des libérateurs après le fait colonial, les guerres mondiales, la guerre froide et l’effondrement du mythe du progrès pour tous.
Cette idée n’a pas tenu longtemps devant la nature des marchands, des banquiers et des armées de l’empire.
L’idée des philosophes de la Post Modernité est séduisante en termes d’espaces et de possibilités de résistance. Grâce à elles sont apparus des plateformes, des processus et des ingénieries facilitant les solidarités intra et inter communautés, la synergie des intelligences, la mutualisation des moyens, la communication et la circulation des idées et de l’argent, l’échange d’expérience, la vitesse de partage de l’information. Ce sont des perspectives et des niches intéressantes en matière de luttes sociales, de démocratisation, d’assemblées citoyennes. Ces perspectives sont prometteuses pour des populations qui ne disposent pas de moyens logistiques pour supporter leur effort de développement, de réseaux de communication traditionnelle pour leurs échanges en dehors des cercles de prédation et de cooptation, d’élites qui gouvernent ou administrent avec équité.
Les belles idées de commerce équitable, de développement durable, d’économies solidaires, de crédit coopératif, d’assurance mutuelle, de formation, d’électrification rurale, d’eau potable, de semences, de financement de la petite et moyenne entreprise, d’acquisition des outillages, de conditionnement des produits de la mer, et mille et un projet de libération sociale et économique étaient en émergence ou en latence.
L’ignorance des enjeux, la confusion entre numérique et virtuel, la culture de l’oppositionnel qui se complait dans la dénonciation et l’anathème, le fardeau de la colonisabilité qui attache l’homme à la chose facile et immédiate au lieu du processus, et mille et un petits détails n’ont pas facilité l’émergence d’espaces de libertés et de résistance post moderne. Les mêmes contraintes ainsi que l’absence de globalité ne nous ont pas permis de s’appuyer sur nos cultures traditionnelles comme passerelle vers la Post modernité pour systématiser la coopérative d’économie solidaire et le crédit coopératif et mutuel comme instrument de résistance contre l’oppression, la corruption et le clientélisme. Ils ne nous ont pas permis de tisser des passerelles de communication, de solidarité et d’échanges entre localités, entre régions, entre peuples, entre offres et demandes hors des marchés mondiaux du colonialisme et des circuits administratifs et informels de la colonisabilité.
Nous pouvons repenser la globalité de la résistance en repensant la technique, la technologie et la communication post moderne sous un angle de plus grande efficacité sociale. La Post modernité ou la néo Post Modernité dans ses possibilités technologiques et dans ses aspects alter mondialistes est une piste pour l’émergence d’une civilisation à échelle humaine qui ne se confine plus à la domination d’un bloc ou à l’affrontement des blocs. La limite à notre compétence de résister devrait être repoussée par notre volonté d’exister et le potentiel d’imaginer que nous avons accumulé par notre mémoire et sa culture de visiter le passé, par notre attention et sa culture d’investir le présent, et par notre attente et sa culture à se projeter dans le devenir.

La grammaire.
La civilisation est un réseau complexe élaboré par la conjugaison et la sédimentation de plusieurs réseaux. Ces réseaux fondés sur une idée de la grandeur de l’homme, sont destinés à garantir l’existence des hommes mis en réseau en leur procurant communauté d’activités, communauté de moyens, communauté d’objectifs, communauté de destin, solidarité dans l’effort et partage des résultats pour le bien individuel et collectif. Ces réseaux d’effort d’existence et de partage de prospérité sont, pour des raisons de pouvoir ou de conservation, poussés à être à la fois des réseaux de résistance et des réseaux pourvoyeurs à un réseau spécialisée à qui sera délégué la fonction vitale et stratégique d’assurer la résistance, la sécurité et la cohésion sociale.
Pour qu’il y ait civilisation il faut que les réseaux fondateurs de la communauté s’inscrivent d’une manière pérenne dans la continuité, l’adaptation et l’interaction de leurs réseaux à travers la mentalité collective, la géographie, l’histoire, l’économie. Une société qui perd sa compétence à tisser ses réseaux et à les maintenir en harmonie et en interaction perd les facteurs de civilisation. Les facteurs de régression deviennent dominants et déterminant. Le colonialisme vient se surajouter à ses facteurs pour saper ce qui reste comme possibilité d’éveil civilisationnel.
Le colonialisme en s’installant ne va pas s’installer comme un rentier temporaire, il va installer sa propre civilisation et ses propres réseaux qui vont agir comme des phagocytes sapant les derniers réseaux d’existence et de résistance. La meilleure image est celle du Coran décrivant la culture d’empire s’emparant d’une civilisation : « y semer la corruption et humilier ses élites ». Le colonialisme et la culture d’empire ne sont pas des accidents dans l’histoire dont il faut attendre la repentance, mais des actes de sabotage de l’histoire dont il faut se prémunir.
L’idée de présenter la résistance globale sous l’aspect civilisationnel c’est pour mettre en exergue 5 éléments (il y en a d’autres) :
Le premier élément est de porter le combat à la hauteur du défi de civilisation.
Le second élément est le rappel d’une vérité occultée : La libération tarde à venir ou n’apporte pas ses fruits lorsque le projet de libération ne porte pas de projet d’édification ou n’est pas accompagné de mesures globales. L’économie, le sol, la mentalité, l’idéologie ne sont pas des accessoires de luttes et de résistance, mais des branches de la lutte.
Le troisième élément est l’axe d’effort : impliquer l’homme dans un chantier de civilisation est l’affaire d’une toile de réseaux qui éduquent, fédèrent et réalisent la grammaire de la civilisation en montrant les incisions et les ruptures que le colonialisme introduit, et en y apportant les ingénieries de restauration et de remédiation qui font résistance.
Le quatrième élément est que le monde arabe et musulman est une virtualité de grands chantiers sur tous les registres de l’existence et de la résistance. Poser l’équation de la libération en termes de civilisation c’est ouvrir de nouveau les horizons à la jeunesse et lui faciliter la réalisation des actes qu’elle porte en potentialité. Chaque chantier et chaque artisan sont des perspectives de luttes.
Le cinquième élément est la globalité. La lutte armée, la résistance citoyenne ou le combat politique peuvent être des déclencheurs, des mobilisateurs, des forces de traction, ou des continuateurs de la résistance mais ils ne peuvent porter exclusivement et intégralement la lutte contre le colonialisme. Sur le plan moral et méthodologique ce serait injuste et inhumain de laisser le poids de la colonisation et de la libération peser sur les seules épaules de la lutte armée.
La résistance globale est sur le plan symbolique une grammaire des civilisations car il s’agit de conjuguer les états et les actes d’existence et de résistance dans leur contexte passé, présent et dans leur devenir. La grammaire c’est l’harmonie et l’interaction pour assurer les liaisons et les continuités.

Conclusion
Nous subissons depuis trop longtemps le colonialisme pour continuer à l’affronter par des actes isolés du reste du monde ou privés de leur dimension civilisationnelle. La vérité -lumière, lucidité et critère – nous ordonne de lutter contre celui qui nie ou interdit notre droit d’exister. Elle nous ordonne aussi de changer de posture pour que les conditions objectives et subjectives intérieures et extérieures qui ont permis l’émergence du négateur de nos droits et le spoliateur de nos possibilités ne puissent plus avoir d’emprise sur nous.

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